- C.G.T.
- C.G.T.La Confédération générale du travail (C.G.T.) est née à Limoges en 1895. C’est une date essentielle du syndicalisme français: il faut attendre 1919, en effet, pour que se crée une autre confédération syndicale: la Confédération française des travailleurs chrétiens. Cependant, le monopole de la C.G.T. pendant la période 1895-1919 ne doit pas faire illusion: le problème de l’unité se pose, bien que ce soit en termes spécifiques; il est l’expression de controverses entre la C.G.T. et la Fédération des Bourses du travail qui l’a précédée et revendique, comme sa mission propre, les tâches de coordination.Après trois scissions, la C.G.T. est ancrée dans le syndicalisme de masse et de classe. Dirigée presque exclusivement par les communistes depuis 1947, adhérente de la Fédération syndicale mondiale qui ne compte guère en Europe occidentale, elle est la principale force sur l’échiquier syndical français, malgré le recul de son influence, due aux modifications du monde du travail, à la crise du mouvement syndical et à la chute des régimes communistes d’Europe de l’Est qu’elle a soutenus.1. Les originesLes origines de la C.G.T. remontent à la fin du XIXe siècle. Après la Commune de Paris et malgré la répression qui a suivi sa défaite, les organisations syndicales réapparaissent rapidement. En 1881, on dénombre déjà en France cinq cents chambres syndicales. Des congrès ouvriers se réunissent à Paris en 1876, à Lyon en 1878 et à Marseille en 1879. Des chambres syndicales constituent des fédérations nationales. La loi du 21 mars 1884, dite loi Waldeck-Rousseau, légalise un état de fait en stipulant que les personnes «exerçant la même profession, des métiers similaires ou des professions connexes concourant à l’établissement de produits déterminés» (ce qui excluait les fonctionnaires et agents de l’État) pourraient, sans autorisation gouvernementale, se constituer en syndicats. Ceux-ci toutefois devaient avoir «pour objet exclusif l’étude et la défense des intérêts économiques, industriels, commerciaux et agricoles». Un congrès réuni en 1886 à Lyon sur convocation de la Chambre syndicale des tisseurs lyonnais décide la création de la Fédération nationale des syndicats et groupes corporatifs de France et des colonies. Cette dernière était influencée par les socialistes disciples de Jules Guesde et groupait les ouvriers sur la base de la profession. Sur le plan local se multiplient dans le même temps les Bourses du travail dont le principal animateur est Fernand Pelloutier. C’est dans ces conditions que s’ouvre à Limoges, le 23 septembre 1895, un congrès d’unification. Il réunit les délégués de vingt-huit fédérations d’industrie ou de métier, de dix-huit Bourses du travail et de cent vingt-six syndicats non fédérés. Ainsi est constituée la Confédération générale du travail. En 1902, au congrès de Montpellier, la C.G.T. renforce son unité et les Bourses du travail sont désormais considérées comme «unions locales ou départementales ou régionales de corporations diverses».Le syndicalisme de la C.G.T. ne limite pas son activité et ses objectifs à la défense des intérêts professionnels; il met en cause la structure et les finalités de la société, comme en témoigne la résolution votée en 1906 au congrès confédéral d’Amiens et connue sous le nom de charte d’Amiens. «La C.G.T., affirme ce texte, groupe en dehors de toute école politique tous les travailleurs conscients de la lutte à mener pour la disparition du salariat et du patronat.» «L’émancipation intégrale [des travailleurs] ne peut se réaliser que par l’expropriation capitaliste.» Si le syndicat est «aujourd’hui groupement de résistance», il sera «dans l’avenir le groupement de production et de répartition, base de réorganisation sociale». Les organisations syndicales sont indépendantes. Elles n’ont pas à «se préoccuper des partis et des sectes qui, en dehors et à côté, peuvent poursuivre en toute liberté la transformation sociale». À vrai dire, deux courants pénètrent alors la C.G.T.: un courant révolutionnaire (anarcho-syndicaliste) qui, préconisant l’«action directe», a précisément trouvé son expression dans la charte d’Amiens et un courant réformiste qui ne rejette pas la collaboration avec les partis politiques et insiste avant tout sur l’amélioration de la législation sociale et la conclusion de conventions collectives de travail. C’est sous l’impulsion de la C.G.T., dont Léon Jouhaux est le secrétaire général depuis 1909, que se développent les grèves revendicatives et aussi de grandes campagnes contre la vie chère, en faveur des «huit heures», contre les insuffisances de la législation sur les accidents du travail et les retraites ouvrières et paysannes («les retraites pour les morts»), contre le militarisme, les expéditions coloniales et les menaces de guerre. En 1912, la C.G.T., qui est alors la seule confédération syndicale, groupe environ 700 000 adhérents sur un total de 7 millions de salariés.2. La scission de 1921La guerre provoque un affaissement de la C.G.T., tandis que, dans leur majorité, les dirigeants se rallient à la politique dite d’union sacrée. Cependant, dès 1916 et surtout à partir de 1917, on observe un nouvel essor de la C.G.T. Après l’armistice, il y a un gonflement rapide des effectifs qui passent selon les statistiques syndicales à 1 200 000 en 1919 et à 2 400 000 en 1920. Toutefois, la C.G.T. ne peut échapper au contrecoup des grands bouleversements mondiaux: révolution soviétique, fin de la guerre, création de l’Internationale communiste, opposition des socialistes et des communistes. Sous l’influence de Jouhaux principalement, la C.G.T. adopte en 1918 un «programme minimum»: «Nous devons nous orienter vers une action positive et ne pas être seulement capables de faire une émeute de rues, mais bien de prendre en main la direction de la production.» Dans cet esprit, la C.G.T. crée en 1920 un Conseil économique du travail. Mais, dans le même temps, éclatent de grandes grèves (celle des cheminots en 1920 est particulièrement importante). Les tendances se heurtent avec violence à l’intérieur de la C.G.T., opposant l’ancienne direction ralliée au réformisme à une minorité révolutionnaire dont l’influence ne cesse de croître. C’est la scission de 1921. Exclus de la C.G.T., les syndicats minoritaires constituent en 1922 la Confédération du travail unitaire (C.G.T.U.) qui agit en liaison étroite avec le Parti communiste et qui adhère à l’Internationale syndicale rouge (I.S.R.).3. La réunification et le FrontAffaiblie par la scission, la C.G.T. ne compte plus que 370 000 adhérents. Elle participe au Conseil national économique créé en 1925, est affiliée à la Fédération syndicale internationale (F.S.I.) et joue un rôle actif au Bureau international du travail. Ses effectifs s’accroissent régulièrement. Elle voit revenir à elle la Fédération des fonctionnaires qui, après la scission, était passée à l’autonomie.Toutefois, sa base de recrutement s’est sensiblement modifiée et ses adhérents appartiennent de plus en plus au secteur public. Pour tenter de pallier les conséquences de la crise économique de 1929, la C.G.T. propose un plan visant à une relance de l’économie. Le mécontentement né de cette crise, la menace des ligues, le rapprochement des socialistes et des communistes, le mouvement du Rassemblement populaire créent pour les organisations syndicales des conditions nouvelles qui s’expriment en un désir profond de réunification, désormais possible. Elle est réalisée au congrès de Toulouse en mars 1936. Si le congrès adopte le plan établi par la C.G.T. avant la réunification, il rappelle cependant «l’opposition absolue qui existe entre les intérêts des salariés que le syndicalisme a pour mission de défendre et les intérêts du capitalisme qu’il combat». Le préambule des statuts précise que «le mouvement syndical à tous les échelons s’administre et décide de son action dans l’indépendance absolue à l’égard du patronat, des gouvernements, des partis politiques, des sectes philosophiques ou autres groupements extérieurs». L’attitude est beaucoup plus souple qu’au temps de la charte d’Amiens. En effet, le mouvement syndical «se réserve le droit de répondre favorablement ou négativement aux appels qui lui seraient adressés par d’autres groupements en vue d’une action déterminée. Il se réserve également le droit de prendre l’initiative de ces collaborations momentanées, estimant que sa neutralité à l’égard des partis politiques ne saurait impliquer son indifférence à l’égard des dangers qui menaceraient les libertés publiques, comme les réformes en vigueur ou à conquérir.» Jouhaux est élu secrétaire général, Dupont, trésorier, Belin, Bothereau, Bouyer, Buisson, Frachon, Racamond (ces deux derniers venant de la C.G.T.U.), secrétaires.Le congrès décide à la majorité l’adhésion de la C.G.T. à la Fédération syndicale internationale. Réunifiée, elle joue un rôle décisif lors des grèves de juin 1936 et conclut avec le patronat les accords dits de Matignon. Ces succès poussent des centaines de milliers de travailleurs vers la C.G.T. dont les effectifs s’élèvent de 785 000 (total des deux organisations qui ont fusionné) à près de 5 millions en 1937.4. La C.G.T. et la Seconde Guerre mondialeMais bientôt les déceptions s’accumulent à l’intérieur: dévaluation, montée du coût de la vie, blocage des salaires, décrets-lois de novembre 1938. De plus, l’évolution de la politique internationale (guerre d’Espagne, accords de Munich) provoque chez les militants de la C.G.T. des réactions divergentes. Il en résulte une diminution des effectifs. Le mot d’ordre de grève générale de vingt-quatre heures lancé le 30 novembre 1938 par la C.G.T. contre les décrets-lois est inégalement suivi. Cependant, avec environ 2 500 000 adhérents, la C.G.T. représente encore en 1939 une force considérable.Les conséquences du traité germano-soviétique, la Seconde Guerre mondiale entraînent une nouvelle crise dans la C.G.T. Les syndicats dont les dirigeants communistes refusaient de condamner le pacte germano-soviétique sont exclus de l’organisation. L’armistice de 1940 et la formation du gouvernement de Vichy mettent en cause l’existence même de la C.G.T. Quelques dirigeants confédéraux d’avant guerre se rallient à la politique de Vichy et l’un d’entre eux, Belin, devient même pendant quelque temps ministre, secrétaire d’État à la Production industrielle et au Travail. Le 9 novembre 1940, la C.G.T. est dissoute, ainsi que la C.F.T.C. créée en 1919.Cependant, la «résistance syndicale» se développe sous toutes les formes: le 17 octobre 1943, par l’accord dit du Perreux, l’unité de la C.G.T. est reconstituée dans la clandestinité. «Le mouvement confédéral, précise ce texte, est réunifié en respectant la physionomie qui était la sienne en septembre 1939.» Réunifiée, la C.G.T. lance le 12 décembre 1943 un appel aux ouvriers: «En combattant, la classe ouvrière ne se coupe pas de la nation, au contraire. Revendiquer un salaire meilleur est un devoir national. La cessation collective du travail, à ce moment-là, devient une action sociale et patriotique.» Des représentants de la C.G.T. participent à l’Assemblée consultative d’Alger et au Conseil national de la Résistance. Le 27 juillet 1944, le gouvernement provisoire de la République avait promulgué à Alger une ordonnance rétablissant la liberté syndicale et restituant à la C.G.T. et à la C.F.T.C. les biens qui leur appartenaient avant leur dissolution. Le 18 août 1944, la C.G.T. donne l’ordre de grève générale pour la libération du pays (en accord avec le bureau de la C.F.T.C.). Très largement suivie, cette grève contribue à paralyser les forces de l’occupant: le 26 août, le bureau de la C.G.T. sort de la clandestinité.5. La scission de 1947À la Libération, la C.G.T. apparaît comme une puissante organisation qui groupera, en 1946, 5 500 000 adhérents. Son XXVIe congrès (avril 1946) entérine les changements qui se sont produits dans le mouvement syndical depuis 1938. Des modifications sont apportées aux statuts qui avaient été votés par le congrès d’unification en 1936. On introduit dans les scrutins entre organisations le principe de la proportionnelle intégrale sur la base de leurs effectifs. La collaboration de fait, qui s’était établie entre la C.G.T. et certains partis politiques pendant la Résistance et au lendemain de la Libération, conduit à poser, autrement que dans le passé, le problème de l’indépendance du mouvement syndical. Sans doute son principe est-il toujours affirmé, mais, si les nouveaux statuts interdisent le cumul des fonctions de membre du bureau de la C.G.T. et de parlementaire, les membres du bureau peuvent très bien appartenir «aux organismes directeurs d’un parti politique». Désormais, le bureau confédéral comprendra deux secrétaires généraux. Ce sont les deux hommes qui représentent alors les deux courants dominants: le militant communiste Benoît Frachon qui fut l’animateur de la C.G.T.U. et Léon Jouhaux. Une nouvelle centrale internationale ayant été créée en 1945 (la Fédération syndicale mondiale), la C.G.T. lui donne son adhésion.Très rapidement, cependant, apparaissent les germes d’une nouvelle scission. Des conflits internes éclatent tout particulièrement à propos de l’attitude à adopter à l’égard du plan Marshall qui posait le problème de l’influence américaine. De plus, les cinq ministres communistes doivent, en mai 1947, quitter le gouvernement présidé par Ramadier. De grandes grèves se déclenchent en novembre-décembre 1947, dont les origines et le développement provoquent de vives divergences au sein de la direction confédérale. Il s’ajoute enfin, en liaison avec tous ces événements, en premier lieu le climat de «guerre froide» qui commence à caractériser alors la situation internationale et ensuite la crainte d’une influence grandissante de la tendance communiste sur le mouvement syndical français, crainte qui se manifeste surtout chez les militants venus de l’ancienne C.G.T. d’avant 1936. Dès lors, un certain nombre de dirigeants démissionnent du bureau confédéral et constituent une nouvelle centrale: la Confédération générale du travail-Force ouvrière (C.G.T.-F.O.) dont Léon Jouhaux devient le secrétaire général.Afin de sauvegarder son unité, une organisation représentative, la Fédération de l’éducation nationale, décide de se constituer en fédération autonome.6. Refaire 36Lors du XXVIIe congrès, en 1948, Benoît Frachon insiste sur l’échec de la division syndicale: «La C.G.T. demeure la grande organisation d’unité de la classe ouvrière.» Néanmoins, le coup porté est sévère, avec une désyndicalisation importante. L’objectif qu’il fixe à l’action est de «liquider définitivement la scission». Pour l’atteindre, les syndicats auront à cœur de pourchasser le «bureaucratisme» et d’assurer le plein épanouissement de la démocratie dans leurs rangs. Les propos du secrétaire général ne furent pas suivis des effets qu’il escomptait.L’existence de F.O. est une donnée durable. La ligne d’action suivie par la centrale de la rue La Fayette n’a guère de risque de la mettre en cause: luttes revendicatives dures, combat contre le plan Marshall. La guerre froide a coupé le mouvement syndical laïque en deux tronçons, dont le plus important est animé par les communistes. Ces derniers s’appliquent à articuler défense du pouvoir d’achat et mobilisation pour la paix, se laissant entraîner parfois à privilégier les objectifs politiques aux dépens de la démarche syndicale. Les manifestations de mai 1952 contre «Ridgway la peste» et la grève du 4 juin pour la libération de Jacques Duclos isolent la C.G.T. de la masse des travailleurs hostiles à la confusion des genres. La direction perçoit les dangers de l’orientation suivie et remet l’accent sur les urgences économiques et l’action de masse. La C.G.T. prend une part active à la grève du secteur public qui éclate en août 1953.À la sortie de la guerre froide, la C.G.T. est secouée par un débat interne sur la planification. La confédération avait adopté en 1953 un programme économique qui est récusé en 1955 parce qu’il menacerait l’indépendance syndicale par une soumission à une logique préconstruite. S’opposant à Pierre Le Brun, secrétaire réformiste qui plaide pour une responsabilité économique qui devrait inciter les syndicalistes à considérer les moyens de financement des revendications, Benoît Frachon, après s’être moqué des orientations de la C.F.T.C., «plan, plan et rantanplan», modère ses critiques, tout en maintenant la priorité de l’attaque contre les profits. La reprise par la C.G.T. de la thèse sur la paupérisation développée à l’époque par Maurice Thorez traduit probablement deux préoccupations: la première, de s’opposer aux vues de Pierre Mendès France sur le néo-capitalisme, et la seconde, de rassurer le P.C.F. qui s’inquiétait d’une autonomisation de la centrale.Pierre Le Brun déclare qu’il accepte le retour à une plate-forme purement revendicative, parce qu’il s’accompagne d’une réaffirmation de l’option en faveur de l’unité syndicale et du rassemblement des forces de gauche. La C.G.T. appelle le 11 janvier 1956 «à la réalisation d’un nouveau Front populaire et à la constitution d’un gouvernement s’appuyant sur toutes les forces de gauche sans exclusive». Les espoirs éveillés par l’accession de Guy Mollet à la présidence du Conseil retombent vite. La C.G.T. se prononce clairement pour l’indépendance de l’Algérie et s’oppose à la «sale guerre» dans laquelle s’empêtre le dirigeant socialiste. La S.F.I.O. réplique en dénonçant le silence de la C.G.T. face à l’intervention des Soviétiques en Hongrie et son appui aux rebelles algériens, ce qui est négliger la méfiance des communistes envers le F.L.N. Le conseil national, tenu à Puteaux les 14 et 15 décembre 1957, décide l’incompatibilité de l’affiliation à la C.G.T. avec l’appartenance à la S.F.I.O., tant les actions de la première sont jugées «contraires aux intérêts et aux idées du Parti socialiste».Évidemment sans succès, la C.G.T. se dresse contre le retour du général de Gaulle au pouvoir. L’échec ne signifie pas son affaiblissement. À la différence du P.C.F., électoralement diminué par l’avènement de la Ve République, la centrale de Benoît Frachon, si l’on en croit ses statistiques, voit ses effectifs remonter à partir de 1958. Dans un contexte difficile en raison de la prolongation de la guerre d’Algérie, l’organisation syndicale est attentive aux modifications des structures économiques et sociales. Elle s’investit à fond dans la grève des mineurs en 1963. Elle conclut, le 10 janvier 1966, un accord avec la C.F.D.T. Benoît Frachon célèbre le trentième anniversaire des accords Matignon en assurant: «Nous sommes actuellement engagés dans une lutte qui n’est pas sans quelque analogie avec celle que nous menions avant Matignon.»7. Renouveler le syndicalisme de lutte de classesGeorges Séguy succède à Benoît Frachon en 1967. Le nouveau secrétaire général a l’ambition de renouveler le syndicalisme de lutte de classes pour répondre aux problèmes nés du post-stalinisme et aux évolutions de la société capitaliste. Le mouvement de mai-juin 1968 confirme ses intuitions. L’action de masse réclame une large démocratie à la base et les revendications doivent concerner l’ensemble des dimensions de la vie du salarié. Le combat contre les gauchistes a été mené avec rudesse et les négociations de Grenelle ont été accélérées par crainte de Charléty. Le recoupement des témoignages permet d’avancer que Benoît Frachon et Georges Séguy n’ont pas été désavoués à Renault-Billancourt et que, selon la formule de Jean-Louis Moynot, «ils se sont consciemment appuyés sur la volonté des travailleurs de Renault de poursuivre la grève».Après la grève générale, la C.G.T. procède à un rajeunissement de ses cadres. Elle rétablit l’unité d’action avec la C.F.D.T. en 1970. Elle soutient le Programme commun de gouvernement à partir de 1972. La manifestation de la crise économique en 1973-1974 ne la surprend pas, mais le rééquilibrage des forces entre le P.S. et le P.C.F. prend sa démarche unitaire à contre-pied. La centrale s’engage à fond dans la controverse qui oppose les deux grandes formations politiques de la gauche. La «bataille pour le renforcement» se perd tandis que l’union autour du Programme commun de gouvernement se défait et que l’entente avec la C.F.D.T. se mue en son contraire.8. Maintenir la C.G.T.Les tensions au sein de la confédération s’intensifient. Deux secrétaires confédéraux, Jean-Louis Moynot et Christiane Gilles, démissionnent en 1981 pour protester contre l’assujettissement de l’action syndicale aux seuls intérêts du P.C.F. La présence de ministres communistes au gouvernement de juin 1981 à juillet 1984 ne simplifie pas la situation. Henri Krasucki devient secrétaire général en 1982 et s’applique à réussir le délicat exercice du soutien critique à l’action menée par Pierre Mauroy. Il est à noter que l’Union générale des fonctionnaires de France C.G.T. ne signera aucun des accords salariaux proposés par Anicet Le Pors. Après le refus des communistes de participer au gouvernement Fabius, la C.G.T. accentue ses mises en cause de la politique suivie par le président de la République et son Premier ministre. Les socialistes demeurés à la confédération expriment leurs désaccords envers une ligne que certains communistes jugent encore trop timorée.Le 24 octobre 1985, la C.G.T. renoue avec la pratique des journées nationales d’action interprofessionnelle qu’elle avait abandonnée depuis cinq ans. Elle entend apparaître comme la seule force syndicale résolument opposée à l’austérité et à la «casse» industrielle. Elle mène une campagne active contre le projet de loi Delebarre sur la flexibilité. Elle appuie le mouvement des étudiants et des lycéens à l’automne de 1986. Elle cherche à élargir la grève des cheminots à l’ensemble du secteur public en janvier 1987. Les rigueurs de l’hiver brisent la tentative. La C.G.T. réussit un vaste rassemblement pour la défense de la Sécurité sociale, le 22 mars 1987.Au moment où il cède la place à Louis Viannet en janvier 1992, même s’il a mis l’accent sur le «monolithisme qui appauvrit la C.G.T» et si le XLIVe congrès a amorcé une timide autocritique en ce sens, Henri Krasucki n’a pas pu enrayer la chute des effectifs dont souffre la centrale, ni brisé l’isolement qui l’affecte tant dans le cadre national qu’au niveau européen. Il peut néanmoins avoir le sentiment d’avoir maintenu un syndicalisme de lutte de classes et relancé une certaine dynamique revendicative.C. G. T. [seʒete] n. f.ÉTYM. XXe; sigle.❖1 Confédération générale du travail. || Membre de la C. G. T. ⇒ Cégétiste.0 Le lendemain, je recevais sur papier en-tête de la C. G. T. la plus jolie déclaration de sentiments vifs qui m'ait jamais été adressée par lettre.F. Giroud, Si je mens, p. 52.➪ tableau Abréviations les plus usitées.2 Anciennt. Compagnie générale transatlantique.
Encyclopédie Universelle. 2012.